identité
paysagère

Parce qu’elle porte le delta le plus vaste de France, celui qui a donné le nom au département, la Camargue est emblématique des Bouches-du-Rhône.

Dimensions
30 km d'est en ouest et 34 km du nord au sud.
Altitude maximale
4 m au mas Cazeneuve au sud-ouest d'Arles
Altitude minimale
-0,30 m à Beauduc
Superficie
986 km²
Population
10 681 habitants
(Insee 12/2020)
Relief
delta et zone paralique

Pas seulement parce qu’elle est cette immense plaine deltaïque, le lieu où le Rhône rencontre la mer Méditerranée, la Camargue est représentative de paysages singuliers, d’histoires d’Homme et de milieux tout aussi particuliers. La Camargue est aussi un paradoxe. Formée par le delta du Rhône, le fleuve qui se sépare en deux bras, le Grand et le Petit Rhône, reste pourtant souvent invisible.

La Camargue est à l’opposé d’autres lieux représentatifs des Bouches-du-Rhône que sont le massif des Calanques et la montagne Sainte-Victoire. Quand ces deux massifs expriment la force minérale par leurs abrupts calcaires, la Camargue et l’embouchure du Rhône affichent une horizontalité presque parfaite. Quand les Calanques et la Sainte-Victoire se caractérisent par leurs milieux secs, ceux de la Camargue sont des paysages d’eau.

Immensité, singularité, traditions, évasion, espaces sauvages…nombre de qualificatifs pourraient être utilisés pour décrire cette vaste région des Bouches-du-Rhône. Pays de traditions et d’histoires, l’attachement de ses habitants est à la hauteur de l’exceptionnel des lieux. La réputation de ces terres attire nombre de visiteurs qui souhaitent découvrir cette immensité d’eau et sa culture singulière. Aujourd’hui le tourisme porte une grande partie de l’économie de l’unité paysagère.

Ces terres pourtant inhospitalières, soumises aux caprices du Rhône dont les eaux inondaient régulièrement les sols, étaient déjà occupées au Néolithique. Le Rhône, voie navigable, rend la Camargue stratégique dès l’époque romaine. Le jeune delta, formé 6000 ans Av. J.C. environ, a été alors mis en culture. À partir de cette époque, l’Homme n’a cessé de construire des digues pour se prémunir des inondations. Mais le delta du Rhône restait instable et ses paysages mouvants. Ce n’est qu’au XIXe siècle avec la construction de la digue du Rhône que le delta a été stabilisé. Cependant cet ouvrage a isolé les terres de l’apport d’eau douce fourni par le fleuve et a privé les sols de l’apport de limons par les crues. C’est ainsi que pour contrôler et maîtriser l’apport d’eau, l’Homme construit tout un réseau de canaux d’irrigation et de drainage.

La Camargue et l’embouchure du Rhône portent des rêves d’évasion sur des terres d’apparence sauvage. Il est vrai qu’avec seulement 10 habitants au km2, cette plaine littorale semble désertique. Et pourtant les terres camargaises sont le résultat d’une véritable anthropisation. L’Homme a façonné ces paysages selon l’usage qu’il voulait en faire et les ressources que lui procurait le delta.

Le nord de l’unité paysagère correspond à la Camargue fluvio-lacustre. C’est le pays des vignes, des prairies et les marais d’eau douce propices à la culture du riz. Les parcelles se bordent de haies pour se protéger du mistral auxquelles s’ajoutent les alignements le long des canaux. Le sud est la Camargue laguno-marine, celle des « Bouches du Rhône ». La salinité de l’eau a offert d’autres ressources. C’est le pays de l’industrie salinière et des sansouires.

Il faut prendre de la hauteur pour découvrir toute la richesse de ces paysages que ce soient les formations végétales, le tracé géométrique des marais salants auxquels répondent les cités ouvrières parfaitement alignées de Salin-de-Giraud. La Camargue et l’embouchure des deux bras du Rhône se découvrent au hasard d’une percée dans les roselières ou les ripisylves.

Si le fleuve et les assauts de la mer semblent être maîtrisés, les paysages de la Camargue et de son littoral restent en perpétuels mouvements. Les variations du niveau d’eau des marais et leur teneur en sel jouent avec la lumière et construisent une gamme chromatique allant du vert au rose en passant par toutes les nuances de bleu et de violet. Il faut y ajouter les gammes de verts, de roux et d’ocres de la végétation, des terres et des sables. Et l’on comprend ainsi la fascination qu’exercent ces paysages sur le visiteur et l’attachement de ses habitants.

Le paysage de la Camargue, « fille du Rhône », se décline selon une subtile combinatoire d’eau, de ciel et de plans limoneux aux franges indécises, intermittentes vers les bras du Rhône et l’infini de la mer.

Les paysages sont fluctuants sous la double influence du Rhône et de la mer. Ils sont liés aux équilibres eaux douces-eaux salées qui, du nord au sud, graduent les vocations des espaces.

Les paysages sont variés et étroitement dépendants des actions humaines.

La présence et l’action de l’homme sont très anciennes. Son intervention sur les milieux et les paysages se traduit par un savant mais fragile équilibre entre activités agricoles, exploitation des salins, ouverture au tourisme, préservation et gestion des milieux naturels, et protection
des eaux.

Communes

Port-Saint-Louis-du-Rhône
Saintes-Maries-de-la mer
Partiellement
Arles

Premières impressions

La Camargue est un monde à part au caractère quasi insulaire, vécu intensément par ses habitants. Ce paysage d’eau aux confins infinis tranche avec la sécheresse de la plaine caillouteuse de la Crau et avec les paysages tourmentés des collines. Le moindre relief appelle le regard : débris échoués sur la plage, dunes, bosquets de pins pignons et linéaire des feuillus le long des deux Rhône ponctuent ou barrent l’horizon.

Terre sauvage, soumise aux rudesses du climat et aux caprices du fleuve.Terre lointaine, inhospitalière, l’espace, immense, ne semble pas à la mesure de l’homme. Terre isolée que l’on ne traverse pas mais où l’on s’enfonce par nécessité ou par curiosité, par passion ou par élan religieux vers les Saintes-Maries.

À l’image stéréotypée et idyllique des chevaux, des taureaux et des flamants, d’un espace vierge de liberté, de pèlerinage gitan, faut-il opposer un espace de conquête ou de reconquête avec les endiguements salvateurs, les salines, la riziculture, le tourisme et la foule estivale des plages ?

Les espaces sont ressentis comme “sauvages” alors que l’œil averti reconnaît dans chaque roubine, marais, grau, plage ou dune, les traces d’un travail incessant.

Surabondance d’approches ? Les nombreux films, reportages, écrits et guides ont parfois contribué à répandre une image stéréotypée de la Camargue, sans doute révolue. Mais ce monde étrange et mystérieux ne pouvait qu’aiguiser l’imagination du poète, du peintre, du photographe et du cinéaste.

Le cinéma

La Camargue a été illustrée au cinéma dès 1906 avec le film « Mysteris » de Joe Hammam. Au total une cinquantaine de films ont été tournés dans ces lieux.

Les peintres, les photographes

Frédéric Bazille, et bien sûr Vincent Van Gogh, Paul Gauguin, et plus près de nous Yves Brayer et les nombreux photographes comme Clergue ont magnifié ces espaces. « La Camargue, des plaines d’herbe où il y a les manades de taureaux et des troupeaux de petits chevaux blancs à demi- sauvages et bien beaux… » Vincent Van Gogh, 1888, Lettre à Théo.

Les écrivains

« (… )La sansouire, l’immensité saline avec les étangs, immobiles qui, dans le lointain, brillaient à l’accoutumée, sous la clarté de la lune.” Joseph d’Arbaud, La Bête du Vaccarès

« La Camargue… une plaine immense, des savanes qui n’ont à l’œil ni fin ni terme… de rares tamaris… et la mer qui paraît.” Frédéric Mistral, Mireille

« La lumière elle-même immobile et fondue à l’air, composait avec l’air un fluide calme où baignaient toutes les choses. Cette poussière lumineuse pénétrait la matière, elle en dissolvait l’opacité sourde et créait à travers les objets les plus sombres une inaltérable transparence. Tous les arbres semblaient de verre et toute l’île un pur cristal.” Henri Bosco, Malicroix

« (…) A perte de vue, parmi les pâturages, des marais, des roubines, luisent dans les salicornes. Des bouquets de tamaris et de roseaux font des îlots comme sur une mer calme. Pas d’arbres hauts. L’aspect uni, immense de la plaine, n’est pas troublé. De loin en loin, des parcs de bestiaux étendent leurs toits bas presque au ras de terre. Des troupeaux dispersés (….) espace infini d’horizons bleus et de ciel ouvert.
Il se dégage de cette plaine un sentiment de solitude, d’immensité, accru encore par le mistral qui souffle sans relâche, sans obstacle.” Alphonse Daudet, Les lettres de mon moulin

« (…)Sur ces vastes espaces plans, l’eau circule à son gré. Elle n’est plus sollicitée par la pente et la pesanteur mais, semble- t-il par un désir. Elle a ses boulevards qu’elle couvre de reflets, elle parait immobile. Il faut s’éblouir pour distinguer le frisson de son mouvement. Elle a ses rives où elle passe, puis qu’elle abandonne et la terre se dessèche et se craquelle comme un cœur. Elle a ses étangs où elle dort. » Jean Giono

Couleurs de l'unité

Bleu du ciel et des étangs, émeraude des rizières, mauve et rose des salins, blanc, jaune et gris des sables ; brun, vert sombre, rouge et ocre de la sansouire, vert tendre des peupliers et des aulnes ; blanc, ocre rose et gris des murs et des toits ; noir et blanc des taureaux et des chevaux…

sous-unités
paysagères

Les sous-unités paysagères individualisent des paysages qui composent une unité paysagère et font valoir des spécificités au sein de l’unité.

structureS
paysagèreS

Un paysage géomorphologique de terre et d’eau

Les apports du fleuve ont modelé la Camargue. Avant l’endigage, les deux Rhône atteignaient la mer en plusieurs embouchures. Les lits variaient au gré des atterrissements laissant des bras morts. Entre les bourrelets alluviaux le long des bras du Rhône et les cordons littoraux modelés parallèlement au rivage, les faibles dépressions se muaient en étangs et lagunes, marais et palustres, en communication avec la mer par les graus.

Par sa construction instable de plans d’eau, de bras, de berges, et de rivages, la topographie changeante reflétait la lutte incessante du fleuve et de la mer, de l’eau douce et de l’eau salée. Les digues du XIXe siècle ont calibré le fleuve, privant la Camargue d’un limon nourricier et le fleuve de son épandage naturel mais ouvrant l’espace à l’occupation humaine non sans une certaine insécurité révélée il y a peu.

 

Un paysage littoral en perpétuel mouvement

Les courants marins et les apports du fleuve produisent des avancées de terres, ensablements progressifs qui modèlent les langues harmonieuses des they de l’embouchure. Ailleurs, les assauts de la mer rongent le rivage qui recule inexorablement à Faraman et sur la plage des Saintes-Maries.

Les nappes souterraines salées imprègnent les sols tandis que les eaux douces remontent par capillarité chaque fois que l’évaporation est intense. L’apport d’eaux douces provient également des pluies et de l’irrigation. Cette dualité détermine la Camargue fluvio- lacustre et la Camargue laguno-marine.

 

Un paysage végétal naturel varié, étroitement lié aux rudes conditions des milieux et dicté par les fluctuations de la salinité

La Haute Camargue était couverte d’une large forêt riveraine à feuillus, épaisse de plusieurs centaines de mètres. Les défrichements opérés lors de l’extension des cultures ont réduit ces boisements à des fragments de ripisylves sur les rives. La Basse Camargue où le sel affleure est le domaine des sansouires, immensités inondées l’hiver, craquelées l’été, aux touffes éparses de salicornes.

Entre ces deux ensembles, les fluctuations de salinité des sols, qui jouent sur d’infimes dénivelés, concourent à une diversité végétale exceptionnelle allant des pelouses et des arbustes (bosquets de genévriers de Phénicie ou de tamaris) aux marais et aux étangs, aux dunes et aux formations de pins d’Alep et de pins pignons. Ces milieux sont exceptionnels et d’une grande richesse faunistique en particulier pour l’avifaune.

Les dunes de Beauduc sont les dernières dunes presque intactes de la côte méditerranéenne française. Une végétation psammophile peuple ces sables marins et fluviatiles. Les dunes intérieures échappent à l’influence du sel, ce qui permet leur colonisation par des formations à brachypode de Phénicie ou des pelouses à petites papillionnacées.

Les dunes fluviatiles sont boisées de chênes verts et de chênes pubescents ou de genévriers de Phénicie en mélange avec le pin pignon (Bois de Rièges, Petite Camargue). La filaire à feuilles étroites est particulièrement abondant et pionnier.

La végétation halophile comprend des peuplements à Ruppia en étangs salés peu profonds au sud du Vaccarès et des peuplements à Cymodocea et des sansouires à salicornes et suèdes sur les vastes plans salés inondés en hiver.

Les ripisylves à peupliers dont la hauteur peut atteindre 15 à 20 m sur les berges du fleuve et le long des canaux comprennent aussi des bosquets d’ormeaux. Quand les terrains sont salés, des tamaris s’y substituent.

 

Un paysage agraire de rizières et de manades

Les crues dévastatrices et fertilisantes ont longtemps conditionné la vie agricole et le développement du delta. Les usages des terres ont ainsi évolué des pâtures aux terres à blé puis aux rizières actuelles au fur et à mesure de la maîtrise du fleuve, du développement de l’irrigation et du drainage.

Nés de la mise en valeur des abbayes médiévales, les terroirs sont structurés en vastes domaines pérennisés jusqu’à nos jours. Le blé associé à la pâture à mouton a cédé la place à la vigne, puis à l’actuelle extension des rizières. Le paysage agraire est en harmonie avec le paysage d’eau. L’on ressent une certaine analogie entre les espaces en eau des rizières de Haute Camargue, les marais et les étangs lagunaires de Basse Camargue, ou entre la sansouire et le territoire des taureaux.

 

Un paysage aux ambiances changeantes au gré des saisons

Sous le rude climat de Camargue, les lieux apparaissent selon les saisons tantôt secs, tantôt noyés sous les eaux avec des variances de couleurs, d’ambiances, de perception.

Les plantes salines s’épanouissent grâce aux eaux montantes printanières. C’est le moment des vols bruyants et lisses des migrateurs dans une lumière diffuse, pâle, décolorée.

L’été dessèche tout : les ombres des tamaris où se réfugient les troupeaux se raréfient, la terre se craquèle, le sel se cristallise en croûte blanche et aveuglante ; des mirages apparaissent dans l’air vibrant de chaleur. Les ocres et les jaunes pâles des herbes contrastent avec les verts sombres et les bruns rougeâtres de la sansouire.

L’automne amène de lourds nuages, avec les bleus, les rouges et les gris des dernières floraisons. Les brumes emprisonnent l’espace.

En hiver, les ciels plombés succèdent à la lumière éclatante sous un mistral glacé. L’eau lisse des sansouires submergées tranche avec une terre grise, fauve, violette, brune.

 

Un paysage bâti dispersé

L’architecture rurale

Les plus anciens domaines se sont implantés sur les bourrelets alluviaux du fleuve ou sur des mottes artificielles, à l’abri des inondations.

Les châteaux d’Avignon, de Brunet, de Giraud ou d’Armellière sont les fleurons de ce patrimoine. Armellière est un remarquable exemple d’architecture maniériste arlésienne de 1607. Un cadre végétal étudié protège ces châteaux du vent et leur apporte ombrage et fraîcheur l’été. Le double alignement des allées annonce cérémonieusement l’entrée.

Les implantations humaines se repèrent grâce à ces arbres et les bâtiments s’entrevoient au travers des bosquets.

Les grandes bergeries ont repris les systèmes constructifs des cabanes. La régression de l’élevage ovin les a fait peu à peu disparaître. Les bergeries conservées sont celles du mas du Pont de Rousty, du mas de Chassagne et de la Favouillane.

 

Une architecture vernaculaire originale

L’architecture du mas privilégie la pierre de taille pour le corps de logis et les locaux fonctionnels. On observe la succession de volumes contigus et la discontinuité des toitures. Le personnel était logé dans de frustes cabanes de « sagno », construites avec les matériaux disponibles sur place : ossature et toiture en roseaux, argiles en remplissage pour les murs. Cette architecture remarquable, caractéristique de la Camargue, est parfaitement adaptée aux conditions de site.

 

Le petit bâti rural

Cabanes, enclos et croix, ponctuent l’espace, témoins ténus de l’histoire des lieux. De nombreux enclos à taureaux émaillent les manades ; les pieux ou les traverses de bois fichées en terre délimitent l’espace clos du Bouvaou.

 

Les cabanons

Les vacanciers se sont appropriés peu à peu une partie des cabanons édifiés à l’origine par les pêcheurs. Des hameaux se sont développés spontanément à Beauduc et sur les theys à Port-Saint-Louis-du-Rhône. Ces hameaux de cabanons désormais en « dur », permanents ou saisonniers, avec caravanes, paillotes et pergolas, occupent les plages. Ils posent de multiples problèmes d’ordre paysager, écologique et réglementaire.

 

Les phares

Les phares appellent le regard par les verticales qu’ils introduisent dans le paysage littoral. Sur ce rivage fluctuant, ils sont parfois déconnectés de la mer. L’Espiguette, la Gacholle, Faraman et Beauduc sont les seuls éléments qui rappellent la présence humaine sur la frange marine.

 

Les ouvrages de maîtrise des eaux

Digues, stations de pompage du XIXe siècle à l’architecture homogène, ponts, canaux et martelières structurent l’espace par leur réseau caractéristique. L’érosion du rivage a nécessité la construction d’épis et de digues en enrochement qui ont profondément modifié le profil initialement linéaire des plages.

 

Les ouvrages de défense

L’exploitation du sel et le contrôle du rivage et du fleuve ont jadis engendré de multiples ouvrages fortifiés. Aujourd’hui, peu d’éléments en témoignent. Les ruines du Fort du Peccais construit en1598 sur les rives de la confluence des canaux du Bourdigou et du Peccaï à Sylveréal se révèlent désormais incongrues dans un espace désertique.

Les vestiges de Tour Vieille subsistent à Beauduc. Ouvrages caractéristiques de Camargue, les tours de guet, au double rôle de défense et de surveillance des troupeaux, sont souvent en ruines ou intégrées au mas. Elles sont alors étêtées ou transformées en pigeonniers : ainsi au Mas Neuf, à Albaron, à Méjane et aux Tours de la Motte.

La toponymie rappelle leur existence quand elles ont disparu.

 

Les cités

L’habitat se regroupe en petits hameaux, souvent issus d’une implantation ancienne : château, abbaye, mas ou domaine. Une seule agglomération importante s’est établie au cœur de la Basse Camargue, les Saintes-Maries-de-la-Mer. Édifiée sur un site occupé dès l’époque romaine en avant-poste d’Arles à proximité du rivage, la cité contrôlait les salins et le littoral. Elle reste une image symbole de la Camargue. Sa silhouette se reflète à l’horizon des étangs, masse minérale compacte resserrée autour de l’église fortifiée. Des ouvrages de protection puissants ont été aménagés pour la protéger de la mer.

Port-Saint-Louis-du-Rhône : la ville commande l’embouchure du Grand Rhône. Elle est implantée à la charnière entre la Camargue et l’unité de paysage du golfe de Fos. La ville, serrée entre le Rhône et les marais, s’échappe aujourd’hui vers le nord, déconnectée du fleuve et du port. Elle apparaît progressivement dans le lointain, tel un îlot du bout du monde après la traversée d’un secteur qui hésite entre espace naturel et industries, mêlant salins, marais, voies ferrées, darses et structures arachnéennes des usines.

À l’est, les hangars et les dépôts ont conquis peu à peu le vaste secteur de Mallebarge aux dépens des sansouires, des manades et des touffes de tamaris. Vers le sud, la ville se dilue en hameaux de cabanes pittoresques le long des canaux et sur les theys entre mer et marais.

 

Les hameaux

Pôles d’habitat modestes, les hameaux sont regroupés selon une forme lâche sans organisation particulière, autour d’un édifice religieux, le long d’une route, souvent en hauteur sur un bourrelet ou une motte. L’occupation perdure depuis la Gaule romaine dans bien des cas.
Gageron est un hameau rural semblable à un gros domaine. Villeneuve est construit sur un bourrelet alluvial autour de la chapelle de Romieu, à la croisée des chemins.

Une église, quelques maisons et les vestiges d’une tour de guet accolée à un mas composent le hameau d’Albaron. Saliers était à l’origine un domaine templier. Aujourd’hui, quelques bâtiments sont disposés en carré autour d’une placette, des maisons encadrent une rue, quelques hangars du XIXe siècle représentent une époque de bel ouvrage.
Le Sambuc est posé entre Vaccarès et Grand Rhône.

Créée à la fin du XIXe siècle pour accueillir les ouvriers de l’exploitation du sel, Salin-de-Giraud, cité ouvrière est remarquable par son organisation en deux quartiers correspondant aux domaines des deux industriels Solvay et Péchiney. Les maisonnettes sont des « corons » tous identiques avec leur jardinet.

caractérisation
paysagère

La couverture végétale 2006 La couverture végétale  2018

• focus sur les milieux naturels

Il s’agit d’un espace qui peut paraître totalement naturel mais qui est en réalité complètement façonné par la main de l’homme : les zones agricoles, essentiellement dans la partie nord, l’industrie du sel au sud, la gestion totale de l’eau, même dans les zones qui paraissent naturelles (marais de chasse, pâturage,…).

Tous ces secteurs n’existent tels qu’ils sont que par un contrôle rigoureux des niveaux d’eau, gérés en permanence par les aménagements hydrauliques : digues du Rhône, digue à la mer, canaux, pompage de l’eau douce dans le Rhône.

Malgré cette profonde artificialisation, le milieu naturel a conservé une bonne part de son exceptionnelle richesse biologique originelle. Les principaux types de milieux rencontrés sont les suivants.

 

Les sansouires

Vastes étendues dominées par des espèces buissonnantes halophiles (adaptées au sel) comme la salicorne (Salicornia sp.), la soude (Salsola soda), la saladelle (Limonium vulgare),… Ces sansouires sont accompagnées d’autres formations végétales également spécialisées tels que les prés-salés ou les steppes salées à saladelles.

 

Les lagunes, étangs et baisses saumâtres

On retrouve ici d’immenses étangs comme le Vaccarès ainsi qu’une multitude de baisses et milieux lagunaires de faible profondeur et de taille très variable dont les eaux temporaires sont favorables à la présence d’espèces particulièrement rares.

 

Les marais d’eau douce

Il s’agit d’étendues d’eau douce à saumâtre, permanentes ou non, occupées par des formations de scirpes lacustres (Schoenoplectus lacustris) ou de roseaux (Phragmites sp.). Ces marais font souvent l’objet d’une gestion de l’eau intensive pour les activités de chasse.

 

Les plages et les dunes

La côte sableuse du département est principalement localisée en Camargue. Ces milieux correspondent aux dunes côtières actuelles, qui ont beaucoup régressé au XXe siècle. Elles présentent différents stades d’évolution selon l’éloignement du bord de mer : dune relique, dune embryonnaire, dune blanche et dune grise. La dune blanche, la plus caractéristique est marquée par sa couverture d’oyat (Ammophila arenaria). On y trouve des espèces emblématiques comme le lis des sables (Pancratium maritimum) ou le panicaut maritime (Eryngium maritimum) ; cette dernière espèce est l’emblème du Conservatoire du Littoral.

À ces dunes côtières s’ajoutent les dunes intérieures « fossiles » d’origine marine, ainsi que les dunes d’origine fluviale déposées par le Rhône.

Concernant la faune, la Camargue est bien sûr un haut lieu pour la conservation des oiseaux en Europe et en Méditerranée. Environ 370 espèces sont répertoriées dans le delta, dont certaines de très forte valeur patrimoniale. En plus des espèces sédentaires, la Camargue est une halte migratoire majeure, très menacée en 2021, une zone d’hivernage pour les oiseaux nordiques (notamment canards et oies), une zone de reproduction et d’estive pour les oiseaux d’Afrique tropicale. On ne citera que le plus emblématique, le flamant rose (Phoenicopterus roseus) qui, en France, ne se reproduit qu’en Camargue.

La Camargue présente également une très grande richesse pour les insectes, les crustacés, les reptiles (avec notamment la tortue aquatique cistude (Emys orbicularis)) et les amphibiens, avec le rare pélobate cultripède (Pelobate cultripes), crapaud méditerranéen inféodé aux mares temporaires.

 

Les atouts et fragilités posent les bases des enjeux et des pistes d’actions. Il s’agit de mettre en avant tel composant de paysage ou telle structure dont les transformations pourraient porter atteinte à la qualité et à la valeur de l’unité paysagère.

• Les atouts

  • Des milieux naturels uniques dans le département.
  • Des paysages et des milieux naturels d’une exceptionnelle richesse.
  • Plus vaste delta de France.
  • Des traditions et une histoire, facteurs d’un patrimoine architectural et culturel riche.
  • Un patrimoine porteur de tourisme.
  • Des pratiques agricoles reconnues par des AOP et des IGP : IGP Riz de Camargue, IGP Vins de sable de Camargue, IGP sel de Camargue, AOP Taureau de Camargue.
  • Le classement de la Camargue en Parc Naturel Régional par décret du 25 septembre 1970, mais aussi pour partie en Réserve Naturelle de France, en réserve Naturelle Régionale, en site classé, en propriétés du Conservatoire du Littoral et en Espaces Naturels Sensibles du Département des Bouches-du-Rhône, en site Ramsar et en réserve de Biosphère.

• Les fragilités

  • La proximité de sites industriels et toutes leurs incidences : pollution, risques, désagréments olfactifs…
  • Les conséquences du changement climatique sur les milieux naturels : marais, étangs, dunes… et sur la zone littorale : submersion marine, coups de mer, recul du trait de côte, remontée du biseau salé…
  • Un afflux de visiteurs et de promeneurs, corollaire de l’attractivité de ces terres singulières par leurs paysages et leur histoire.
  • Le développement de plantes exotiques envahissantes, phénomène récurrent dans tous les milieux humides du département.
  • Le devenir de l’activité salinière et de ses motifs paysagers.

• Carte des infrastructures

Depuis Arles, trois routes principales desservent le territoire de la Camargue : à l’ouest la RD520 rejoint les Saintes-Maries-de-la-mer et à l’est les RD35 et RD36 rejoignent Port-Saint-Louis-du-Rhône. Le Grand Rhône n’est franchissable qu’à Arles, dans sa périphérie immédiate et à Salin-de-Giraud, faubourg sud d’Arles. Depuis la RD36, il faut pour rejoindre Port-Saint-Louis-du-Rhône emprunter le bac de Barcarin à Salin-de-Giraud.

Le Petit Rhône marque la limite avec le département du Gard et ne se franchit que par le pont de Sylveréal et la RD38c en direction d’Aigues-Mortes.

Une seule route traverse l’unité paysagère d’est en ouest : la RD37 au nord de l’étang de Vaccarès. Excepté leur gabarit qui les différencie, les routes partagent de longues portions rectilignes presque monotones, bordées aux abords des communes par des alignements de platanes ou de pins comme à Port-Saint-Louis-du-Rhône. Les vues alternent entre les cordons de roseaux, de tamaris avec de larges dégagements. Les vues sont parfois aussi cadrées par les talus des digues.

En dehors des axes principaux, les routes sont peu larges et c’est ensuite tout un réseau de pistes qui dessert les mas et domaines isolés.

Les infrastructures sont aussi énergétiques. Vingt-cinq éoliennes bordent le canal de navigation du Rhône au port de Fos-sur-Mer, sur la commune de Port-Saint-Louis-du-Rhône.. Un parc photovoltaïque s’est installé à Salin-de-Giraud, à côté de l’usine de fabrication de principes actifs pharmaceutiques. Implanté au carrefour entre la RD36 et la route qui mène au bac de Barcarin, les perceptions sont directes sur les alignements de panneaux solaires.

Il faut, à ces infrastructures, ajouter les très nombreux canaux et fossés qui maillent le territoire ainsi que les digues. Ces ouvrages hydrauliques sont essentiels à la gestion des eaux, à la pérennité de l’activité des hommes et à leur maintien sur ces terres, qui à l’origine étaient marécageuses et insalubres.

Bien qu’il ne soit encore qu’à l’état de projet à date de l’actualisation de l’atlas, la construction du pont de Barcarin engagera des transformations, à commencer par la reprise du gabarit de la RD36.

Dynamiques
d'évolution

Occupation des sols en 2006 Occupation des sols en 2019

• occupation des sols

Les cartes ci-dessusconfirment la qualité d’unité paysagère peu peuplée. Il n’y a pas, pour l’embouchure du Rhône et la Camargue, de larges taches urbaines. Ses paysages sont ceux des cultures et des milieux humides.

L’urbanisation des Saintes-Maries-de-la-mer et de Port-Saint-Louis-du-Rhône s’est opérée dans l’enveloppe urbaine connue en 2006.

Les évolutions portent sur les milieux humides. Les cartes ci-contre montrent un recul de la surface en eau. À la marge, d’autres étangs ont été restaurés.

Clé de lecture

Le graphique exprime les évolutions paysagères et urbaines de l’unité paysagère, entre 2006 et 2021.

Il rend compte d’une manière synthétique des évolutions que porte l’unité paysagère.

Le gradient attribué à chaque item est le fruit d’observations de terrain, d’analyses cartographiques et de données.

L’analyse est quantitative.

Dans cet exemple, la surface de la forêt n'a pas évolué.

• fACTEURS d'évolution

La Camargue correspond au delta du Rhône. C’est un milieu jeune, complètement différent du reste du département : entièrement constitué de sédiments récents, très plat et presque totalement humide et en partie salé.

Ce vaste espace littoral est sans doute un des plus exposés du département aux changements climatiques. Cet aspect est aussi abordé dans la fiche thématique du changement climatique.

Les simulations faites par la communauté scientifique*, relatives à la hausse du niveau de la mer révèlent que la Camargue serait totalement submergée à l’horizon 2100, conséquence de l’élévation du niveau de la mer de 1 m.

Les actions du Parc Naturel Régional de Camargue et des autres gestionnaires œuvrent pour la protection de ses milieux mais aussi pour le maintien de pratiques agricoles et la valorisation de sa culture.

Les traditions de la Camargue, sa culture ou plutôt ses cultures associées aux origines diverses de sa population, et plus particulièrement la culture gitane, ses vastes étendues « sauvages » attirent un nombre de visiteurs de plus en plus important.

Les facteurs d’évolution sont ainsi :

  • Les dynamiques naturelles liées au changement climatique.
  • L’activité agricole.
  • Le tourisme.
  • Le développement des énergies renouvelables.

* carte éditée par le BRGM, se reporter également à la fiche thématique « changement climatique »

• Les dynamiques urbaines

L’urbanisation s’est faite à la marge de la trame existante. Une nouvelle zone bâtie s’est créée à Port-Saint-Louis-du-Rhône au sud du canal Saint-Louis.

Ailleurs, que ce soit à Salin-de-Giraud ou aux Saintes-Maries-de-la-mer, les nouvelles constructions se sont installées dans l’emprise de l’enveloppe urbaine.

Il n’y a pas eu de développement urbain marqué ; ce dernier est encadré par la charte du Parc Naturel Régional de Camargue. De plus l’évolution démographique est faible. Port-Saint-Louis-du-Rhône a vu sa population passer de 8 483 habitants en 2006 à 8 503 en 2020*, soit une hausse d’à peine 1,3 %. Pendant ce même temps, les Saintes-Maries-de-la-mer perdaient 7 % de sa population.

L’ambition de Port-Saint-Louis-du-Rhône affichée dans son PADD** approuvé en 2017 est d’accueillir 500 habitants supplémentaires en 10 ans. La ville s’est engagée dans son renouvellement urbain avec notamment la requalification de son bassin central. Le PADD met en place des actions pour dynamiser la création de logements mieux adaptés aux demandes et réhabiliter son parc ancien. Dans la lignée de la tendance actuelle, les attentes se portent sur l’habitat individuel. Ainsi le nouveau quartier du Mazet y répond. De nouvelles zones sont aussi ouvertes à l’urbanisation autour du canal Saint-Louis, destinées à de l’habitat collectif dans la continuité de ce qui a déjà été réalisé.

Impacts

  • Occupation d’espaces libres dans le tissu urbain.
  • Constructions « sur la ville ».
  • Réhabilitation de quartiers

* source INSEE 2006 avec mise à jour en 2009 et chiffres de décembre 2020
** PADD : Projet d’Aménagement et de Développement Durables intégré au PLU

• Les dynamiques économiques

L’agriculture

La carte ci-dessus confirme la vocation agricole de l’unité paysagère et le maintien de l’activité.

Des surfaces en prairie ont été gagnées sur les étangs. Au nord de l’unité paysagère, aux abords d’Arles, des surfaces de maraîchage ont disparu au profit de cultures céréalières. Des évolutions ont eu lieu dans les pratiques culturales et les cultures en elles-mêmes. Des parcelles ont été remises en vignes, d’autres avec des cultures fruitières (pommes par exemple) au gré des subventions agricoles européennes.

Impacts

  • Maintien de la vocation agricole des sols et des paysages agraires.
  • Apparition de cultures sous serre.
  • Nouvelles cultures et nouveaux motifs paysagers : vignes et arboriculture / floraison printanière, nappes de voiles de protection…
  • Entretien du réseau de canaux et de fossés.

 

Les activités salinières

L’évocation de la Camargue ne peut être dissociée de celle des marais salants. Le sel a été utilisé dès la Haute Antiquité.

L’activité industrielle salinière a débuté au XIIIe siècle pour s’intensifier au XIXe siècle. Elle a organisé la vie des Hommes et les paysages. Avec elle s’édifie Salin-de-Giraud avec ses corons et ses maisons de maître. Des voies ferrées ont été construites pour l’acheminement du sel, exportations faites aussi par voies maritimes.

Les usages du sel sont aujourd’hui multiples : alimentaires, agricoles, routier (salage) et matière première pour l’industrie chimique. Le groupe Salins (anciennement les salins du Midi) est le troisième producteur européen de sel.

Impacts

  • Création de paysages spécifiques et géométriques.
  • Paysages mouvants avec la hauteur fluctuante des camelles et la couleur des marais variant selon leur salinité.
  • Patrimoine architectural : corons et domaines.

 

L’activité industrielle et portuaire

Port-Saint-Louis-du-Rhône partage ses paysages industriels et portuaires avec sa voisine, Fos-sur-mer. C’est indéniablement l’activité qui a transformé de façon notable les paysages du golfe de Fos. Port-Saint-Louis-du-Rhône est née de l’activité portuaire et si, aujourd’hui, la commune oriente son économie vers le tourisme, l’industrie portuaire marquera encore les paysages.

La rizerie sur les bords du canal Saint-Louis a stoppé son activité en 1970. Mais elle est un pan important de l’histoire de la commune et revêt aujourd’hui une valeur patrimoniale.

Le Plan Local d’Urbanisme réserve encore des zones pour l’implantation d’activités à Malebarge et Garrouyas. Cela laisse présager de nouveaux paysages industriels ou tout du moins d’activités. Elles accueillent des activités liées au nautisme et à la mer (pôle économique Nautisme et Mer sur la presqu’île du Mazet), de nouvelles filières pour la transition énergétique et participent à l’essor de la plateforme logistique Distriport.

Impacts

  • Impact visuel des installations portuaires et industrielles.
  • Développement de nouvelles zones d’activités et logistiques.
  • Augmentation du trafic routier.
  • Assèchement de zones humides (proscrit en 2021) et consommation de sols perméables.

 

Le tourisme

La Camargue est une terre de traditions et de pèlerinages. Les vastes étendues de sable, de marais séduisent les amoureux de grands espaces. C’est ainsi que le tourisme tient une part importante dans l’économie de l’unité paysagère, porté par des espaces d’une exceptionnelle beauté, un patrimoine architectural et des traditions encore bien vivantes.

Les cabanes de gardian, les mas et domaines, les édifices religieux ou les anciennes fortifications sont les témoins de l’Histoire, histoires des hommes et de leur mode de vie.

La Camargue est une terre de pèlerinages. Les Saintes-Maries-de-la-mer en accueillent plusieurs pèlerinages. En mai les communautés gitanes du monde entier s’y rassemblent. Ils sont aussi religieux avec le pèlerinage des Saintes et celui de la « Translation des Reliques » en décembre.

C’est aussi une terre de festivités : fêtes dans les manades, ferias, fêtes votives et festivals animent la vie des habitants et visiteurs durant toute l’année.

Formidable manne économique, le tourisme génère un nombre important de visiteurs qu’il faut accueillir.

Impacts

  • Afflux de véhicules de toutes sortes : véhicules de tourisme, caravanes et campings-cars.
  • Aménagements d’infrastructures d’accueil : aires de stationnement pour véhicules et campings cars, campings…
  • Augmentation de la fréquentation des milieux naturels : promenades équestres et pédestres.
  • Fréquentation estivale des plages importante.

 

Les énergies renouvelables

Le potentiel éolien et solaire est élevé sur ces terres camargaises. Si les surfaces des bâtiments industriels ont été mises à profit, un parc solaire a néanmoins été installé sur une friche herbacée à proximité de l’usine à Salin-de-Giraud. Son impact visuel est notable, les abords étant dépourvus de tout traitement.

L’implantation des 25 éoliennes le long du canal du Rhône à Fos révèle la part des énergies renouvelables sur le territoire de la Camargue.

En 2021, un débat public a été lancé pour le développement du projet de parc éolien offshore au large de Port-Saint-Louis-du-Rhône, à l’issue duquel l’expérimentation a été autorisée.

Impacts

  • Dévalorisation des paysages des routes avec la perception directe sur les panneaux solaires.
  • Utilisation des surfaces en toiture pour le solaire.
  • Alignements d’éoliennes transformant les horizons de la plaine et fonctionnant comme élément de repères paysagers.

Les projets futurs identifiés en 2006,
qu'en est-il en 2021 ?

Développement des structures d’accueil touristique : en cours.

Recherche de sites d’implantation d’éoliennes : certains projets réalisés ; celui du canal du Rhône à Fos et au sein des sites industriels.

Digues et enrochements de protection du littoral : nouvelles digues aux Saintes-Maries-de-la-mer.

Projet de développement de la zone industrialo- portuaire de Fos en rive gauche du Rhône : en cours.

Digues du Rhône : en cours.

Projet de création d’un pont à Barcarin : études en cours.

enjeux &
pistes d'action

Les évolutions constatées permettent d’établir les enjeux. Les enjeux sont les aspects des évolutions qui préoccupent les acteurs du territoire, les gestionnaires et/ou les populations.

Les paysages exceptionnels de Camargue soumis à la double influence du Rhône et de la mer

L’action humaine complexifie les phénomènes. La fluctuation des biseaux d’eau salée et d’eau douce détermine des milieux écologiques spécifiques et autant de paysages végétaux et aquatiques particuliers. L’action de l’homme, très ancienne, guide l’évolution des paysages. Elle a pour objet la sauvegarde d’un savant et fragile équilibre entre facteurs écologiques, mise en valeur agricole, exploitation des salins, développement touristique et protection et gestion des eaux.

Toute modification des apports d’eaux douces et d’eaux salées influe sur l’étendue des étangs, la nature des populations végétales et animales et le développement des activités agricoles, en particulier des rizières. L’amenée d’eau douce provoque le recul des milieux saumâtres et salés caractéristiques de la Camargue (sansouire, espaces à saladelle, salicorne). La mise en rizière passe par une rectification topographique précise, un modelé de plans réguliers, un découpage parcellaire spécifique qui dessinent un paysage géométrique, uniforme.

Le rivage de la Camargue est par nature fluctuant, soumis aux vents et ouvert aux vagues, qui génèrent des cordons dunaires. La mouvance de ce linéaire s’accorde peu avec l’humanisation des paysages qui tend à fixer le rivage par des digues à la mer et des enrochements de protection du littoral.

 

La sensibilité visuelle

Ce paysage où dominent les horizontales est particulièrement sensible à tout développement en hauteur. Bosquet, ripisylve, construction, sont autant de points d’appel du regard, visibles parfois de très loin comme dans le cas du phare de Faraman ou de celui des camelles de sel et de la silhouette des Saintes-Maries depuis l’étang des Launes.

L’étendue des panoramas, leur ampleur et leur profondeur dépendent des masques visuels existants, masses arborées ou haies.

La suppression des structures végétales arbustives ou arborescentes peut être aussi source d’impact visuel majeur du fait de l’ouverture de nouvelles perspectives, de la suppression d’effets de masque ou de repères ou par le gommage de l’appréciation des échelles dans la lecture du paysage.

Le Guide Éolien PACA a inscrit l’ensemble du delta et la Petite Camargue en zones de sensibilité majeure, espaces a priori incompatibles avec l’implantation d’éoliennes.

La rive est du Grand Rhône est inscrite en zone de sensibilité très forte où la faisabilité d’un parc éolien est fonction d’un parti d’aménagement prenant en compte les enjeux paysagers de l’unité de paysage.

Les évolutions constatées permettent d’établir les enjeux. Les enjeux sont les aspects des évolutions qui préoccupent les acteurs du territoire, les gestionnaires et/ou les populations. Il s’agit d’articuler la connaissance avec les actions* et d’inviter les acteurs à se positionner.

L’ensemble de l’unité paysagère est inscrite dans le périmètre du Parc Naturel Régional de Camargue qui fixe les règles de préservation des paysages mais aussi de la culture et des traditions camargaises.

Les paysages de la Camargue sont le fruit d’un juste équilibre entre activités humaines et ressources naturelles. Cette combinaison fragile porte des enjeux multiples.

 

Les effets du changement climatique

La Méditerranée est une des régions les plus vulnérables au changement climatique. La Camargue pourrait être l’illustration d’un extraordinaire paradoxe. Alors que les prévisions du GIEC (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) la prévoient submergée par les eaux d’ici 2100, elle subit des épisodes de sécheresse de plus en plus marqués. Les conséquences de cette submersion marine seront la destruction non seulement des paysages mais de toute l’histoire des hommes qui ont occupé ces terres et avec elle les traditions et la culture camargaises.

Comme évoqué plus haut, la Camargue est un territoire faussement sauvage. La nécessaire gestion de l’eau est à l’origine d’un vaste réseau de canaux et de digues. Ce réseau est toujours indispensable à l’exploitation et l’usage des sols. Les ouvrages hydrauliques doivent être entretenus pour rester efficaces. Ils dépendent directement de l’activité humaine mais ils subissent les aléas climatiques qui seront de plus en plus intenses et « capricieux ».

  • Transformation et/ou disparition d’écosystèmes conséquences du changement climatique et des phénomènes de submersion.
  • Évolution du trait de côte, ensablement ou érosion.
  • Augmentation des épisodes climatiques extrêmes : tempêtes, sécheresses, inondations…
  • Développement d’espèces exotiques envahissantes.

 

La sauvegarde des milieux humides et littoraux

La diversité des milieux humides d’eau douce et d’eau salée a construit une multitude d’habitats, de formations végétales et autant de paysages. C’est ici que se découvrent les littoraux sableux et dunaires, exceptionnels dans ce département dont la côte est principalement rocheuse.

C’est aussi le territoire de la rencontre du Rhône et de la mer. Theys, étangs et baisses composent l’embouchure du Grand Rhône. A l’ouest, le Petit Rhône a un estuaire plus modeste mais il s’entoure également de formations végétales typiques des milieux humides abritant une faune riche. Ces terres, à l’origine marécageuses et insalubres, ont été assainies par la mise en place d’un réseau de canaux et de digues qui assure la gestion de l’eau à des fins d’irrigation et de drainage. C’est un astucieux assemblage d’éléments de nature et d’objets construits.

La valeur paysagère et écologique est aujourd’hui reconnue. Plusieurs outils réglementaires et de gestion sont en place pour assurer leur préservation et leur gestion : zonages PLU, zones Natura 2000, sites classés, sites inscrits et la charte du Parc Naturel Régional de Camargue. Ces milieux humides ont une très forte valeur paysagère. Ils ont fait de la Camargue un lieu unique. Ils sont aussi porteurs d’une économie agricole, industrielle et touristique.

Depuis 2006, une partie des étangs de Salin-de-Giraud a été cédée au Conservatoire du Littoral. Celui-ci a remis en place une gestion pour un retour à l’état naturel du fonctionnement des étangs, avec des ouvertures dans la digue à la mer permettant la pénétration des eaux marines. Les étangs retrouvent leurs cycles saisonniers avec leur assèchement en été.

Ce nouveau mode de gestion préfigure la Camargue du futur, celle du recul stratégique face à l’élévation du niveau de la mer.

  • Conservation de la diversité écologique des milieux par les outils réglementaires.
  • Richesse des paysages grâce à la diversité des milieux d’eau douce ou salée, de leurs formations végétales associées.
  • Agrément des vastes étendues comme lieux de promenade et de loisirs.

 

La pérennité de l’activité agricole

La Camargue est une terre d’agriculture. Le riz et l’élevage de taureaux sont ses productions agricoles emblématiques et reconnues par des IGP et AOP. La viticulture fait aussi partie de ses productions labellisées.

L’activité agricole participe à la qualité paysagère grâce à la diversité des cultures mais elle assure également l’entretien des canaux d’irrigation et leurs ouvrages associés : martelières, graus, digues…

Avec l’activité agricole c’est aussi tout un patrimoine architectural qui est préservé et valorisé : mas, domaines et manades.

  • Diversité de la mosaïque agricole et scénographies paysagères grâce aux cultures fruitières.
  • Entretien de la trame des haies de la Camargue agricole.
  • Entretien et préservation des canaux d’irrigation, de leurs ouvrages mais aussi de la végétation spécifique associée qui bordent les canaux et fossés : roselières, ripisylves…

 

Le développement des activités portuaires et industrielles

Les installations se partagent avec l’unité paysagère du golfe de Fos. Si une grande partie est sur le territoire communal de Fos-sur-mer, les équipements industriels et portuaires font partie intégrante des paysages de Port-Saint-Louis-du-Rhône. La Zone Industrielle de Fos, les lointains de Lavéra et la centrale thermique de Ponteau composent les vis-à-vis depuis les plages d’Olga, de Carteau et du they de la Gracieuse.

Les activités industrielles et portuaires profitent au développement de tout un réseau d’activités associées (sous-traitants, activités manufacturières, logistique, transports…) qui ont besoin de foncier et de structures pour exercer leur activité. Pour encadrer la densification des activités portuaires, le GPMM décide, en 2021, d’une Opération d’Aménagement, l’OAZIP 2040, afin de définir les grandes orientations d’aménagement avec tous les acteurs du territoire dans une démarche de développement durable*.

  • Développement de nouvelles zones d’activités avec leurs corollaires de hangars aux volumes de plus en plus démesurés., zones de stockage, de stationnement et manutention.
  • Consommation de foncier et ruptures de la trame verte et bleue.

 

Le développement du tourisme

Depuis toujours, la Camargue a attiré touristes et visiteurs. Les grands rassemblements religieux et communautaires jalonnent la vie de ses habitants. Le tourisme est récréatif, sportif et culturel. Simples promenades, activités balnéaires, randonnées pédestres, à vélo ou équestres sont autant d’activités qui peuvent être pratiquées.

Port-Saint-Louis-du Rhône a réorienté son activité portuaire vers la plaisance et les métiers de la mer. Le départ de certaines activités industrielles de leur site originel comme la rizerie est l’occasion d’un nouveau tourisme notamment mémoriel.

L’afflux de visiteurs, s’il est bénéfique au dynamisme économique du territoire, nécessite des aménagements et fait peser des risques sur les milieux naturels. (piétinement en dehors des chemins, stationnement sauvage…).

  • Régression du camping sauvage grâce à une réglementation encadrant ces pratiques.
  • Augmentation des flux de véhicules et apparition de conflits d’usage.
  • Aménagements spécifiques et mise en défends de certains lieux avec multiplication de mobiliers : barrières, potelets, rochers…
  • Création d’espaces de stationnement minéralisés et imperméables.
  • Création d’aires d’accueil pour les campings-cars.
  • Encombrement visuel par l’accumulation de véhicules.
  • Dégradation des milieux par piétinement, surcreusement à force de passages…

 

L’évolution de l’activité salinière

L’activité des salins connaît un certain déclin. À partir de 2008, le Conservatoire du Littoral se porte acquéreur de terrains auparavant propriété des Salins du Midi. La cession de terrains au Conservatoire du

Littoral, ou leur rachat, s’est poursuivi jusqu’en 2010. Depuis cette date, le littoral camarguais est protégé sur plus de 20 000 hectares comprenant également la Réserve Naturelle Nationale de Camargue. Il constitue le plus grand espace préservé par le Conservatoire du Littoral**.

La gestion hydraulique a été stoppée, les pompages d’eau de mer arrêtés, laissant les étangs s’assécher naturellement en été. Ce qui a entraîné, entre autres, des arrêts de reproduction des flamants dans l’étang du Fangassier. Ce retour à un fonctionnement naturel s’accompagne depuis par des ruptures de la digue à la mer, permettant aux eaux marines d’entrer naturellement, lors des épisodes de Sud-Est.

  • Transformation des milieux humides et aquatiques.
  • Adaptation de la faune et de la flore.
  • Apparition de nouveaux paysages.
  • Nouveaux modes de gestion préfigurant la Camargue future, celle du recul stratégique face à l’élévation du niveau marin.

Le développement des énergies renouvelables

Le développement des énergies renouvelables se heurte à des intérêts divergents entre transformation des paysages et nécessaire transition énergétique. Le projet de parc éolien offshore est relancé mais d’autres expérimentations sont à l’étude en mutualisant, par exemple, des espaces déjà dévolus aux énergies renouvelables, comme le projet de parc photovoltaïque sur le talus des éoliennes, propriété du GPMM. De même, l’utilisation des toitures des installations industrielles est une alternative à développer.

  • Impacts visuels des éoliennes.
  • Impacts au sol et visuels des parcs photovoltaïques.
  • Gain pour les paysages avec l’utilisation des toitures des bâtiments industriels.

*Au Sommet de la Terre de Rio en 1992, la notion de développement durable est définie comme étant un développement économiquement efficace, socialement équitable et écologiquement soutenable.

**source : site internet du service public d’information sur l’eau « eaufrance », rubrique zones humides.

Les périmètres de protection en 2021

Organiser le développement des énergies renouvelables et des infrastructures énergétiques :

Tenir compte des impacts sur les paysages : impact visuel des alignements d’éoliennes.

Encourager le solaire en toiture.

Composer avec des paysages très anthropisés comme les sites industriels.

Assurer la préservation et la valorisation des milieux humides (marais, étangs, littoral…) : en conformité avec les priorités de la charte du PNR de Camargue (10.1, 10.2, 10.4, 10.5, 10.6 et 10.7)

Soutenir et/ou réintroduire l’activité salicole.

Assurer l’entretien des ouvrages nécessaires au fonctionnement des ouvrages hydrauliques : digues, martelières, canaux, graux, pertuis…

Maintenir / composer une zone tampon entre milieux humides et urbanisation

Proscrire toute action d’assèchement à des fins d’urbanisation, de mise en culture ou d’implantation d’activités.

Préserver les espaces littoraux : organiser les aires d’accueil, gérer le stationnement et l’accueil des usagers…

S’adapter aux effets du changement climatique : submersion des zones côtières, érosion des cotes, coups de mer…

Préserver les paysages des routes

Protéger les alignements d’arbres et engager leur replantation en cas d’abattage.

Envisager des espèces alternatives au platane en anticipant le changement climatique et en considérant le sol.

Qualifier le paysage des routes en mettant en scène les paysages traversés : axes de vue, cadrages, alignements…

Conforter le rôle de la route dans sa fonction de découverte des paysages.

Valoriser l’agriculture pour son rôle dans l’entretien des paysages et le maintien de la qualité paysagère : en conformité avec les priorités de la charte du PNR de Camargue (10.3)

Encourager une agriculture diversifiée qui participe à la multiplicité des paysages.

Préserver les trames paysagères associées aux pratiques agricoles : haies, canaux…

Soutenir l’agriculture de proximité en faveur de la reconstitution des circuits courts, pour favoriser les pratiques extensives respectueuses de l’environnement.

Accompagner les équipements nécessaires à l’activité agricole : hangars, serres… dans leur forme, dimensions, matériaux…

Encourager la réhabilitation des bâtiments d’exploitation traditionnels et la préservation des petits éléments : puits, cabanons…

Préserver et entretenir les cabanons en bord de canal : en conformité avec les priorités de la charte du PNR de Camargue (10.8)

Proscrire toute extension et changement de destination.

Entretenir les façades dans une gamme chromatique harmonieuse et conforme à la palette locale.

Aménager les abords et veiller à la qualité de traitement des clôtures.

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