identité
paysagère

La Durance a organisé l’économie et construit l’histoire des départements traversés depuis sa source dans les Hautes-Alpes jusqu’à la cluse de Mirabeau dans les Bouches-du-Rhône.

Dimensions
53,60 km d'est en ouest et 20,20 km du nord au sud.
Altitude maximale
271 m à Saint-Canadet
Altitude minimale
80 m au seuil d'Orgon
Superficie
175,40 km²
Population
29 969 habitants
(Insee 12/2020)
Relief
vallée

La Durance est une de ces vallées structurantes de la région Provence Alpes Côte d’Azur.

La Durance a organisé l’économie et construit l’histoire des départements traversés depuis sa source dans le massif du Chenaillet au-dessus de Montgenèvre (Hautes-Alpes) jusqu’à la cluse de Mirabeau dans les Bouches-du-Rhône. Passée cette cluse, elle quitte définitivement ses attaches montagnardes et préalpines.

Elle a creusé une vallée entre les derniers reliefs calcaires avant de rejoindre le Rhône au sud d’Avignon. Entre le massif du Luberon en rive droite, celui du Concors, puis de la chaîne des Côtes et de la Trévaresse en rive gauche, la vallée alterne entre évasements et resserrements jusqu’au seuil d’Orgon. Elle installe ici la limite avec le Vaucluse.

La fertilité de ses sols est propice à une agriculture dynamique et diversifiée. Mais cette vallée a aussi donné les opportunités pour l’implantation d’infrastructures majeures, infrastructures de déplacements et énergétiques. Ainsi, les paysages de la vallée sont contrastés, entre une naturalité affirmée et de grandes infrastructures, et portent la marque d’une anthropisation.

La Durance ne se devine que par la vallée qu’elle a creusée. Les vues sur la rivière sont rares. Elle se révèle depuis les points hauts des villages comme Alleins ou depuis les ponts qui l’enjambent. La ripisylve qui l’accompagne l’entoure et la cache du regard.

Cette rivière cachée l’est aussi par l’organisation historique de la vallée. La Durance a été une rivière aux crues dévastatrices avant les travaux engagés pour réguler son débit et exploiter l’énergie hydraulique. Dans l’histoire, la Provence souffrait de trois fléaux : le mistral, le Parlement et la Durance.

Rien d’étonnant à ce que l’Homme se soit installé en retrait de ce cours d’eau capricieux. Les villages sont perchés, les routes historiques éloignées du lit de la rivière et c’est ainsi que la Durance est peu visible.

Un ouvrage va aussi profondément modifier les perceptions de la vallée : le canal EDF dont les talus sont de véritables barrières étanches à tout dégagement visuel.

Communes

Alleins
Charleval
Mallemort
Le Puy-Sainte-Réparade
Peyrolles-en-Provence
Saint-Estève-Janson
Sénas
Partiellement
Meyrargues, La Roque-d’Anthéron, Venelles, Lamanon, Eyguières, Orgon

Premières impressions

La Basse Durance est une terre de contrastes, un havre de verdure entre les collines sèches et boisées. La rivière, vagabonde et sinueuse, parcourt le lit majeur, vaste et caillouteux. Un liseré de feuillus en révèle la présence. La mosaïque des champs irrigués compose un paysage ouvert de maraîchage et de vergers qui se ferme progressivement vers l’ouest en bocage à peupliers et à cyprès. Les pâtures, les vignes et les oliviers ourlent les piémonts des massifs riverains.

Puis, les versants boisés tissent la toile de fond du paysage de la vallée. Les crêtes déchiquetées et les falaises des Alpilles, les collines plus douces des Côtes et de la Trévaresse, le plateau de Manivert et au nord la barre sombre du Luberon constituent les limites visuelles de la vallée. Un chapelet de villages pittoresques et vivants s’est établi en piémont, à l’abri des crues. La campagne environnante est ponctuée de bastides et de châteaux. Bordés de peupliers ou de roseaux, les canaux d’irrigation sont les témoins d’une mise en valeur intensive des terrasses alluviales. Les linéaires des voies de communication, les pylônes, les lignes THT et les gravières perturbent l’image rurale de ce paysage.

 

Regards sur la vallée de la basse Durance

Les écrivains

Michel Pezet écrit :  » La Durance et le mistral sont les purs enfants de la Provence (…). Pour nous, la Durance, saignée, hélas jusqu’à la pierre et au sable d’or de son lit, incarnera toujours l’âme de notre Provence haute nouée par elle à la magie des rives latines (…) au fil de la Durance, de la cluse rocheuse de Sisteron au Rhône, restera toujours le souvenir de la vallée heureuse. »

Les peintres

Les peintres de l’École Provençale ont porté leur regard sur la Durance au XIXe siècle. Paul Guigou a été inspiré par le défilé de Mirabeau et le large espace caillouteux du lit vif.

Couleurs de l'unité

Mosaïque de vert, brun, jaune des cultures ; camaïeux de vert tendre des ripisylves ; bleu, vert, émeraude, gris argenté des eaux de la Durance ; blanc, ocre, rose, gris du bâti…

sous-unités
paysagères

Les sous-unités paysagères individualisent des paysages qui composent une unité paysagère et font valoir des spécificités au sein de l’unité.

Les sous-unités ont été définies par l’atlas des paysages de 2006. De cet atlas sont retenues les sous-unités paysagères de la plaine du Puy-Sainte-Réparade et de Peyrolles-en-Provence, du seuil de la Roque-d’Anthéron, des bords de la basse Durance, de la plaine de Mallemort et de Charleval et de la plaine de Senas.

structureS
paysagèreS

Un paysage géomorphologique créé par la Durance

Les alluvions de la Durance et de ses affluents se sont étagées en larges dépôts tabulaires plus ou moins entamés par l’érosion. Les terrasses les plus anciennes affleurent entre Peyrolles et Meyrargues, puis d’Alleins à Lamanon où elles forment une large assise érodée de multiples petits vallons à hauteur du massif des Roques. Le seuil de Lamanon entre Alpilles et massif des Roques est l’un des anciens passages de la Durance. La longue plaine continue est issue de ce remblaiement. Au cœur de la vallée, en aval de Mirabeau et jusqu’à Orgon, la terrasse ancienne disparaît sous les alluvions récentes.

 

Un paysage végétal spontané exceptionnel autour de la rivière

Les versants de garrigue, de chênaie verte ou blanche et de pinèdes toujours vertes contrastent avec l’espace fluvial, domaine humide ouvert et avec les séquences de ripisylve feuillue, havre de verdure et de fraîcheur aux couleurs changeantes avec les saisons.

La rivière : à partir du lit vif, les groupements végétaux s’échelonnent selon le gradient hydrique du lit mineur au lit moyen. Cette répartition illustre les différents stades de colonisation par la végétation spontanée.

  • Les plans d’eau courante à hauts fonds sont le domaine des algues et des cressonnières. Une végétation herbacée s’infiltre sur les larges plages de galets et de limons. Les roseaux (Typha latifolia) vont à l’assaut des plans d’eau vers le courant.
  • Les zones stagnantes, les bras morts sont investis par les cannes de Provence, les scirpes et les joncs. Puis s’installent les arbustes (argousiers). Les jeunes saules et les peupliers annoncent la forêt galerie qui, d’abord composée de peupliers noirs, de saules et d’aulnes, atteint sa maturité avec les chênes blancs et les ormes.
  • D’un espace ouvert, bruissant des flots de la rivière, on passe progressivement au paysage fermé de la forêt galerie.

Cette répartition végétale se retrouve tout au long de la vallée avec des variances tenant à l’étendue du lit vif, à l’échelle des terrasses, à la présence de talutages et de gravières ou aux conséquences des crues.

 

Un paysage agraire varié, caractéristique du terroir méditerranéen irrigué

Ici, la moitié de la surface est cultivée. L’agriculture s’est adaptée à des microclimats liés à une gélivité qui s’accroît d’ouest en est. Au terroir diversifié de Peyrolles succèdent progressivement les cultures céréalières, fourragères et les vignes entre Meyrargues et la Roque-d’Anthéron. Puis apparaissent les cultures maraîchères et fruitières, de plus en plus présentes après Mallemort. A l’ouest, le paysage très cloisonné avec ses haies de peupliers et de cyprès coupe-vent annonce le bocage de fruitiers et de maraîchage de la plaine du Comtat. Les cultures sèches des piémonts s’organisent autour de Saint-Canadet, au Puy-Sainte-Réparade et à Alleins. Les restanques à olivettes et les vergers cèdent souvent le pas à l’urbanisation diffuse.

 

Un paysage structuré par les trames végétales

Les haies parallèles, les ripisylves le long des canaux, le long de la Durance et de ses affluents et l’alignement de beaux platanes le long des routes, scandent le paysage de la Basse Durance. Ce sont des structures paysagères majeures. Le réseau des anciens canaux d’irrigation constitue un patrimoine historique et paysager majeur. Il est souligné par le linéaire arborescent des ripisylves. Les grands remblais du canal de Provence ont déstructuré les piémonts.

 

Le paysage bâti

Le patrimoine rural : quelques cabanons animent encore le parcellaire cultivé. Les murets qui encadrent l’entrée des domaines et ceux des restanques de piémont marquent de leur géométrie régulière le paysage cultivé. Croix et oratoires ponctuent les parcours vers les chapelles isolées le plus souvent perchées au-dessus de la vallée.

Les bastides : de nombreuses bastides sont implantées à la lisière du massif de la Trévaresse : Fonscolombe, Arnajon, Bonneval, Saint-Estève-Janson et Lamanon.

Le patrimoine des ponts : les anciens ponts suspendus de Mirabeau, de Mallemort et de Pertuis sont de beaux ouvrages d’art.

Les villages : à l’écart des caprices du fleuve, les villages se tiennent en hauteur le long du piémont sud ou sur des buttes, des promontoires.

caractérisation
paysagère

La couverture végétale 2006 La couverture végétale  2018

• focus sur les milieux naturels

La Durance est une rivière de type méditerranéen dite « en tresses », caractérisée par ses iscles graveleux et ses multiples bras qui sillonnent entre les iscles sur un lit très large.

Elle présente un régime mixte pluvio-nival, à la fois influencé par les apports pluviométriques liés à la fonte des neiges en zones alpines et montagnardes et par les apports irréguliers du climat méditerranéen. Dans ce contexte, la Durance présentait, par le passé, à la fois des crues catastrophiques en automne et surtout au printemps et des étiages sévères en été mais également en hiver. Les importants aménagements hydro-électriques dont elle a fait l’objet tempèrent aujourd’hui ces effets et permettent le développement de sa ripisylve, la forêt galerie bordant le cours d’eau.

Les iscles, au plus proche du lit vif, se présentent sous la forme de bancs de galets, de plages de graviers et de dépôts limoneux. Ces milieux renferment essentiellement des espèces végétales herbacées, le plus souvent annuelles. Les iscles même constituent l’habitat de prédilection pour la nidification d’oiseaux patrimoniaux dans les cailloux tels que le petit gravelot et la sterne pierregarin. Les berges sablo-limoneuses, quant à elles, sont régulièrement érodées et forment de petites falaises favorables à la nidification du martin-pêcheur, du guêpier et de l’hirondelle des rivages.

Lorsqu’on s’éloigne du lit vif, les secteurs moins remaniés par les crues courantes voient se développer une végétation arbustive (fourrés de saules) puis la ripisylve. La ripisylve présente plusieurs faciès selon le taux d’humidité dans le sol : peupleraie à peuplier blanc et peuplier noir avec frêne et orme et, dans les secteurs les plus humides, aulnaie-saulaie.

La ripisylve renferme souvent des zones d’eaux lentes, des bras secondaires, où se retrouvent la tortue aquatique cistude d’Europe, l’agrion de Mercure (petite libellule patrimoniale) et surtout l’espèce emblématique de la Durance : le castor d’Europe. Elle est également l’habitat d’un très grand nombre d’oiseaux. Par ailleurs, les vieux arbres matures sont riches en insectes saproxyliques tels que le lucane ou le grand capricorne.

Enfin, certains aménagements de la Durance (barrages, seuils, anciennes gravières,…) ont créé de vastes plans d’eau qui, malgré leur caractère artificiel, offrent aujourd’hui une richesse toute particulière vis-à-vis de l’avifaune.

Les berges boisées et roselières de ces gravières sont d’une grande importance pour la reproduction d’espèces patrimoniales comme le blongios nain, le héron pourpré ou la rousserole turdoïde. Les plans d’eau libre accueillent d’importantes colonies d’anatidés (canards, oies,…) en hivernage : c’est le cas dans les secteurs de Peyrolles-en-Provence, Meyrargues, le Puy-Sainte-Réparade, Mallemort, Sénas…

En arrière de la Durance, s’étend la plaine agricole, relativement pauvre du point de vue de la biodiversité (cultures intensives de type arboriculture et maraîchages, serres,…). Ces milieux ont toutefois quelques attraits liés à leur caractère frais et humide (en raison de l’irrigation) et à la présence de friches abritant des espèces messicoles.

La faune également est globalement très banale et plutôt anthropophile.

Les atouts et fragilités posent les bases des enjeux et des pistes d’actions. Il s’agit de mettre en avant tel composant de paysage ou telle structure dont les transformations pourraient porter atteinte à la qualité et à la valeur de l’unité paysagère.

• Les atouts

  • Un paysage agraire riche et diversifié composé de vergers, terres maraîchères et céréalières à la faveur de sols alluvionnaires au fort potentiel agronomique.
  • Des ressources naturelles (eau et matériaux) qui place la vallée dans un rôle stratégique pour l’économie départementale et régionale.
  • Les paysages évolutifs d’une rivière méandreuse.
  • Le pittoresque des villages perchés et leur silhouette compacte et organisée.
  • Un patrimoine urbain et architectural, héritage d’une histoire riche et du rôle stratégique de la vallée dans l’Histoire.

• Les fragilités

  • Une péri-urbanisation diffuse en plaine désorganisant la structure historique des villages.
  • Des espaces agricoles soumis à la pression urbaine.
  • Une multiplication de petites zones d’activités et commerciales le long des axes routiers qui dévalorisent les entrées de ville.
  • Des activités d’extraction impactant les paysages rivulaires.
  • Une exposition au risque inondation et rupture de barrage.

• Carte des infrastructures

A l’image de son statut de couloir de communication naturel, la vallée de la Basse Durance porte des infrastructures de déplacements et énergétiques d’échelle régionale.

Le réseau est dense entre les routes historiques (ancienne RN7) qui empruntent le fond de vallée depuis la cluse de Mirabeau jusqu’au seuil d’Orgon et celles modernes qui la traversent avant de rejoindre d’autres passages naturels comme les autoroutes A7 et A51 qui convergent vers le sud et Marseille.

Qu’ils soient de déplacements ou énergétiques, ces ouvrages marquent les paysages de la vallée. Ils sont de différentes natures et interagissent sur les paysages comme barrières fonctionnelles et écologiques :

  • Les autoroutes A7 et A51.
  • Les voies ferrées.
  • Le canal EdF et les autres canaux : canal des Alpines, de Peyrolles…
  • Les digues et ouvrages de régulation des crues.
  • Les centrales hydroélectriques, leurs postes de répartition et les faisceaux de lignes HT qui en partent.

Dynamiques
d'évolution

Occupation des sols en 2006 Occupation des sols en 2019

• occupation des sols

Les cartes ci-dessus révèlent les dynamiques d’évolutions urbaines et paysagères. L’urbanisation se diffuse à partir des centres historiques, certaines nouvelles zones urbaines en discontinuité. L’usage des sols a évolué comme sur la commune de Peyrolles-en-Provence où une ancienne zone d’extraction est devenue espace de loisirs.

Les évolutions sont multiples sans qu’une tendance prédomine.

La diffusion de la tache urbaine est visible pour chacune des communes, avec un processus plus marqué à Meyrargues et au niveau du seuil de Lamanon.

Des surfaces agricoles disparaissent à un endroit mais d’autres sont récréées ailleurs. Cependant, il ne faut pas nier que l’urbanisation se développe au détriment des terres agricoles dont la disparition est souvent irréversible.

Les transformations des paysages rivulaires peuvent être brutales et sont sans doute les plus perceptibles quand a lieu la création de nouveaux sites d’exploitation. Ailleurs les lieux d’extraction abandonnés sont revalorisés en espaces de loisirs nautiques comme à Peyrolles-en-Provence. Autre évolution : la mise en place de fermes photovoltaïques en lieu et place de carrières.

Clé de lecture

Le graphique exprime les évolutions paysagères et urbaines de l’unité paysagère, entre 2006 et 2021.

Il rend compte d’une manière synthétique des évolutions que porte l’unité paysagère.

Le gradient attribué à chaque item est le fruit d’observations de terrain, d’analyses cartographiques et de données.

L’analyse est quantitative.

Dans cet exemple, la surface de la forêt n'a pas évolué.

• fACTEURS d'évolution

L’unité paysagère de la vallée de la Basse Durance tient un rôle important dans l’économie du département de par ses productions agricoles mais aussi ses autres activités économiques. Elle est aussi parcourue par des infrastructures majeures, énergétiques et de déplacements.

Si ces grands ouvrages sont réalisés depuis plusieurs décennies, sa proximité avec des centralités économiques et urbaines a des incidences sur ses paysages. Avignon, Cavaillon, Salon-de-Provence, Aix-en-Provence sont ces pôles urbains et il faut également compter sur le site de Cadarache, proche de Peyrolles-en-Provence, pôle économique majeur qui est à l’origine de créations d’emplois, donc de nouveaux habitants, et de recalibrage de voirie pour les convois exceptionnels qui apportent sur site les modules de construction.

Ces bassins d’emplois attirent de nouvelles populations et la pression urbaine s’exerce sur les espaces agricoles de la vallée pour lesquels le relief ne présente pas de contraintes.

Les facteurs d’évolution sont principalement :

  • Le dynamisme économique et son offre d’activités très diversifiées.
  • L’urbanisation périphérique des centres historiques.
  • Les activités d’extraction.
  • L’activité agricole et plus particulièrement sa pérennité.
  • Les grands axes de circulation dans leur capacité à réduire les distances avec les grands pôles urbains.

Certaines évolutions urbaines ont répondu à des opportunités foncières et des besoins économiques. Aujourd’hui le paysage, dans sa capacité à créer un cadre de vie de qualité de plus en plus recherché, son rôle dans la gestion des changements climatiques ont poussé les politiques et tout autre acteur de l’aménagement du territoire à le considérer comme porteur de projet et non plus comme une simple valeur esthétisante.

Parce qu’ils offrent l’avantage de la planéité d’un relief, la vallée subit la pression du développement économique et urbain, consommateur de foncier. Placer le paysage comme fondateur des aménagements a plus de résonance sur ces territoires.

• Les dynamiques urbaines

L’impétuosité de la rivière a repoussé l’Homme sur les versants ou sur des points hauts se protégeant ainsi de crues dévastatrices. Les terres enrichies des alluvions de la rivière ont ainsi été réservées à l’agriculture.

La forme historique groupée des villages s’est entourée de zones pavillonnaires. Les paysages péri-urbains se sont substitués aux paysages agricoles qui dessinaient l’enveloppe villageoise. L’augmentation de la population générale de l’unité paysagère, environ de 14%*, fait naître de nouveaux besoins en logements, services et équipements. Ce processus est en cours, comme en témoignent en 2021 plusieurs panneaux indiquant l’implantation prochaine de nouvelles constructions ou des viabilisations déjà réalisées. Certains PLU réservent des zones à urbaniser.

Impacts

  • Consommation de sols agricoles.
  • Urbanisation des périphéries sur les sols plats du fond de vallée moins contraignants.
  • Densification et complexification du maillage viaire secondaire et tertiaire.
  • Création de petites zones commerciales, corollaire de l’urbanisation.

 

* source INSEE 2006 avec mise à jour en 2009 et chiffres de décembre 2020

• Les dynamiques économiques

Si les grandes infrastructures qui ont bouleversé les paysages (autoroute, canal EdF, centrale hydroélectrique…) ont été antérieures à 2006, les transformations des paysages se font à la marge mais leurs impacts n’en sont pas moindres. Ce peut être la cause d’une désorganisation des paysages de la vallée.

 

L’agriculture

L’agriculture est encore dynamique. Si des zones cultivées ont été urbanisées, et par conséquent artificialisées, souvent de façon irréversible, d’autres parcelles ont été remises en culture. Les évolutions portent ici sur les types de culture et les modes culturaux.

De nouvelles cultures, issues de la reconversion d’anciennes cultures ou de la remise en culture de friches, sont apparues, profitables à la diversité des paysages agricoles et à la mosaïque agricole et conjointement de nouvelles pratiques comme le développement de cultures sous serre.

La trame paysagère tient dans la diversité des cultures mais aussi dans les éléments associés comme les haies brise-vent et les canaux d’irrigation qui sont autant de motifs paysagers qui qualifient les paysages et donnent la valeur paysagère à cette vallée.

Impacts

  • Diversité des cultures : replantation de vergers et de vignes.
  • Vitalité économique du territoire et participe à son attractivité.
  • Maintien de motifs paysagers et d’ouvrages hydrauliques.
  • Développement des cultures sous serre.

 

Les activités d’extraction

Ces activités transforment brutalement les paysages et les milieux. Elles marquent par la prégnance de leurs installations (grues, barges, rampes…) et les volumes stockés qui fluctuent durant leur phase d’activité. Ces paysages sont en constante évolution avec le jeu des extensions de carrières, de désaffectation avec mise en eau ou de comblement et développement de friches.

Impacts

  • Destruction de milieux ripicoles.
  • Apparition de nouveaux équipements : grues, rampes, silos…
  • Densification d’un trafic Poids Lourds avec la rotation des entrants et sortants.
  • Émission de poussières.

 

Les zones artisanales et commerciales

Ces nouvelles zones sont à la fois le corollaire du développement urbain et la cause de la croissance démographique. Elles offrent les emplois nécessaires au dynamisme économique d’un territoire et répondent aux besoins des nouvelles populations. Les zones artisanales obéissent à des objectifs de fonctionnalité avant tout et d’opportunités foncières. Sénas, Lamanon, Peyrolles-en-Provence, Meyrargues se sont dotées de ces petites zones commerciales et artisanales, profitant d’un relief plat et d’un réseau routier développé.

Impacts

  • L’artificialisation des périphéries villageoises.
  • Dégradation des entrées de ville.
  • Étirement de l’urbanisation le long des routes et désordre visuel des entrées de ville.
  • Formes rudimentaires et couleurs franches dont la juxtaposition rend l’ensemble disharmonieux.
  • Abords non aménagés, perception directe des zones de stockage et de manutention.

 

Les énergies renouvelables

L’exploitation de la ressource eau de la Durance comme énergie est effective depuis de nombreuses années. Plusieurs centrales hydro-électriques se trouvent sur son parcours, dont la plus spectaculaire est celle de la cluse de Mirabeau. Les postes électriques connexes sont le départ de plusieurs faisceaux de lignes HT et THT dont les supports métalliques s’alignent dans la vallée ou la traversent et l’entrelacement de leurs câbles en brouillent les perspectives.

Le Schéma Régional de l’Eolien classe la vallée de la Durance comme faisant partie des paysages présentant une sensibilité majeure. A ce jour aucun site n’est retenu pour des projets.

Le développement des autres énergies renouvelables, nécessaire à la transition écologique, transforme de façon certaine les paysages. C’est le cas du solaire. Si le développement du solaire en toiture a l’avantage d’être plus discret, il en est tout autrement avec l’installation de parcs photovoltaïques qui questionnent sur la conciliation des intérêts paysagers et écologiques. Le choix de les installer sur d’anciennes carrières peut sembler vertueux, mais l’impact sur les paysages est indéniable comme le montre le parc à Charleval. Installé en lieu et place d’une carrière, il est directement perceptible depuis la RD3561 au nord du site. Des merlons de terre l’isole au sud le long de la RD561.

Impacts

  • Destruction de milieux et d’habitats naturels.
  • Stérilité des sols.
  • Cicatrice paysagère par l’absence de traitement des abords et des interfaces.

Les projets futurs identifiés en 2006,
qu'en est-il en 2021 ?

Recherche de sites éoliens
vallée classée de sensibilité majeure.

Projet de carrière et de zone d’activités de l’Espougniac entre l’A51 et la RD556
remplacé par l’installation d’un parc photovoltaïque

Mise en œuvre du Projet d’Intérêt Territorial de l’Etat “Durance” ;
En particulier, préservation de l’identité paysagère du défilé de Mirabeau et restauration du patrimoine bâti : en cours

enjeux &
pistes d'action

Les évolutions constatées permettent d’établir les enjeux. Les enjeux sont les aspects des évolutions qui préoccupent les acteurs du territoire, les gestionnaires et/ou les populations.

Sensibilité visuelle

Les liens de covisibilité entre les versants et les terrasses sont importants. Les versants de garrigue et de pinède et les rebords des terrasses alluviales, en belvédère sur la plaine et le lit de la rivière, sont ainsi d’une grande sensibilité visuelle.

Cette sensibilité est affirmée par des conditions de sites difficiles avec des pentes fortes, une végétation fragile, des risques d’érosion, qui multiplient les risques d’impacts majeurs en cas d’aménagement sur ces secteurs.

Les panoramas depuis le piémont sur le paysage des terrasses multiplient des vues très attractives. A l’est, le paysage ouvert aux larges panoramas présente une forte sensibilité visuelle. A l’ouest, le paysage est de plus en plus cloisonné jusqu’au bocage de haies brise-vent de la plaine Sénas-Orgon. Les vues sont encadrées et la suppression de la trame arborescente peut induire de profondes modifications paysagères tandis que son maintien aide à l’insertion visuelle des aménagements. En particulier, la vallée présente une sensibilité majeure à l’implantation d’éoliennes entre Pertuis et Sénas et depuis le défilé de Mirabeau jusqu’à Meyrargues. La sensibilité est très forte au droit de Pertuis et forte dans la plaine de Sénas.

 

Une sensibilité écologique et paysagère pour le lit mineur et la ripisylve de la Durance

Le secteur de la rivière entre Pertuis et Mallemort est le dernier exempt d’aménagement lourd : il est d’une richesse écologique exceptionnelle. La Durance constitue l’élément structurant et identitaire majeur du paysage.

 

Les trames linéaires

La trame arborescente des haies de peupliers et de cyprès, des platanes le long des routes et des entrées des domaines, celle des ripisylves le long des canaux, des ruisseaux et de la rivière structurent et fondent l’identité du paysage de Basse Durance.

 

Les transitions douces entre le terroir cultivé et les villages anciens.

Les sites des villages ponctuent les piémonts, au contact entre le terroir sec des versants périphériques et le terroir irrigué des terrasses alluviales. Ils sont très lisibles dans le paysage. Les villages aux formes urbaines contrastées ont conservé d’harmonieux fronts bâtis au contact direct d’une campagne encore peu perturbée par l’urbanisation diffuse. Un équilibre entre paysage agraire et paysage bâti a permis le maintien d’une qualité et d’une identité forte de ces paysages. Les abords des villages sont ponctués d’architectures majeures : château, domaine, oratoire, chapelle, abbaye…

L’identité villageoise

La proximité de bassins économiques donne à cette vallée une certaine attractivité renforcée par le caractère villageois de ses communes, évocateur d’un bien-vivre. L’augmentation de la population a fait naître de nouveaux besoins en logements, équipements, services et commerces. Les centres historiques s’entourent alors de nouvelles zones, essentiellement pavillonnaires. La pression urbaine impulsée par la proximité d’Aix-en-Provence, Salon-de-Provence, Cavaillon et Pertuis se poursuit aujourd’hui.

Chaque commune voit ses périphéries urbaines augmentées de nouvelles cellules pavillonnaires. Il faut à cela ajouter les petites zones d’activités et commerciales qui se greffent le long des routes. Des limites à l’urbanisation sont posées par des éléments physiques (cours d’eau, relief, infrastructures routières, canaux…). Ils contraignent les extensions et font se reporter les possibilités sur d’autres espaces dénués de contrainte.

  • Attractivité des centres historiques grâce au pittoresque et au charme de leur structure urbaine et leur architecture traditionnelle provençale.
  • Désorganisation des franges urbaines avec le mélange de zones d’habitat et d’activités.
  • Perte de lecture de l’enveloppe villageoise par la péri-urbanisation.
  • Banalisation des caractères architecturaux avec la répétition d’un modèle standardisé de maisons sur catalogue. Apparition de nouveaux caractères architecturaux étrangers aux caractères locaux : enduits blancs, ouvertures anthracites…

 

La diversité agricole

L’armature paysagère de la vallée est en grande partie celle de la trame agricole. La diversité des cultures et les motifs paysagers qui leur sont associés, comme les canaux d’irrigation et les haies brise-vent, font la richesse de ce paysage de vallée. L’agriculture porte le dynamisme économique du territoire. Véritable atout pour sa vitalité économique, des élus s’engagent pour maintenir cette activité dans toute sa diversité : arboriculture, maraîchage, viticulture, céréales…

  • Mosaïque agricole porteuse de qualité paysagère.
  • Maintien de la trame paysagère des haies et de leur fonction comme corridors écologiques.
  • Composition d’un paysage aux scénographies saisonnières : floraisons printanières des fruitiers, couleurs automnales de la vigne, nappes blanches ou noires des voiles de protection des fruitiers, empilement coloré des caisses de ramassage…
  • Absence d’interface entre urbain et cultures.
  • Entretien des équipements liés aux pratiques agricoles : canaux, hangars, puits…
  • Apparition de nouveaux motifs paysagers liés à l’évolution des pratiques agricoles : serres et tunnels.

 

Le développement des activités

Si elles portent le dynamisme économique du territoire, elles impliquent de nouvelles installations et sont gourmandes de foncier. Qu’elles soient zones artisanales, commerciales ou d’extraction, elles induisent des mutations de paysage notables. Installées au plus près des flux, elles modifient les premières perceptions d’un village et influent son attractivité.

  • Perte de lisibilité de l’enveloppe urbaine : étirement des limites de la ville le long des routes.
  • Désorganisation des paysages d’entrée de ville par l’hétérogénéité des formes, des couleurs et l’amoncellement d’enseignes.
  • Perte de surfaces perméables et/ou agricoles.

 

Les paysages des infrastructures

Ils sont multiples. Il y a ceux des routes et ceux de l’énergie. Il y a les ouvrages qui donnent à voir, comme les routes et ceux qui fonctionnent en rupture comme les autoroutes, le canal EdF et les voies ferrées. S’ils sont nécessaires à la vitalité économique d’un territoire et à son fonctionnement, ils agissent comme des faisceaux hermétiques. Ils peuvent être néanmoins porteurs de paysage comme la végétation qui borde ponctuellement le canal EdF.

Exception faite des axes autoroutiers, l’unité paysagère est parcourue par un réseau de routes dont certaines sont des tracés historiques comme la D7n ancienne RN7. Elles offrent en héritage de ce passé des alignements de platanes. Élément exogène des paysages de Provence, il a été planté à la fin du XVIIIe siècle sur les ordres de Napoléon pour apporter le confort à ses troupes lors de leurs déplacements. Il est aujourd’hui une figure référente des paysages de Provence.

Les attaques du chancre coloré ont imposé des campagnes d’abattage. D’autres raisons ont motivé leur suppression : sécurité routière, élargissement de routes… Mais il peut aujourd’hui retrouver sa place dans les paysages grâce notamment aux variétés résistantes à ce champignon et à des aménagements routiers adaptés.

  • Rôle des alignements d’arbres comme armatures paysagères et pour le confort des déplacements.
  • Valeur des paysages routiers avec leurs cadrages, vues et perspectives qui rythment les parcours et rompent avec la monotonie des grands axes.
  • Espace de découverte des paysages.
  • Ruptures dans les continuités fonctionnelles urbaines et écologiques.
  • Confusion dans les perspectives avec l’entremêlement des lignes HT.

 

Les paysages rivulaires

L’alternance des périodes de charge du cours d’eau et d’étiage remodèlent en permanence les paysages rivulaires. Leur richesse écologique est reconnue par les périmètres de protection définis à leur encontre.

Les bancs de sable, les espaces herbacés, les ripisylves sont les paysages de cette rivière qui la cachent mais la révèlent aussi par des camaïeux de verts et de gris que seule la végétation ripicole offre.

Mais la Durance est aussi une ressource économique qui est à l’origine de transformations radicales avec les activités d’extraction de granulats.

La production d’énergie, les besoins de réguler cette rivière impétueuse ont construit des paysages anthropiques.

  • Transformations liées aux aléas climatiques : périodes d’étiage plus longues qui permettent le développement d’une végétation ripicole arborée.
  • Transformation des berges avec la disparition ponctuelle de ripisylve et l’apparition de structures métalliques associées aux activités d’extraction.
  • Création d’espaces de loisirs avec exploitation des gravières.
Les périmètres de protection en 2021

Préserver les paysages des routes

Accompagner le développement des infrastructures routières

Éviter le surdimensionnement des routes et ronds-points.

Veiller à la qualité des ouvrages connexes : voies d’insertion, giratoires, murs anti-bruit, équipements de protection…

Encourager des accotements enherbés.

Protéger les alignements d’arbres et engager leur replantation en cas d’abattage. Envisager des espèces alternatives au platane en anticipant le changement climatique et en considérant le sol.

Conforter le rôle de la route dans sa fonction de découverte des paysages par la prise en compte des paysages de proximité traversés.

Accompagner le développement de l’habitat individuel

Avoir une gestion économe des sols et encourager des formes urbaines compactes.

Limiter l’effet « mitage » des boisements en pensant densité et forme.
Assurer la continuité avec la trame urbaine existante et penser des espaces publics continus comme élément de structure urbaine (rues, places, évasement…) et non en « poches » (voies en boucle).

Aménager les interfaces avec les milieux forestiers pour assurer leur préservation et limiter le risque incendie.

Composer les façades des nouvelles rues.

Promouvoir une qualité architecturale conforme à l’identité locale pour éviter la répétition d’un modèle standardisé, des matériaux et couleurs étrangers aux palettes locales.

Maintenir la lisibilité de l’enveloppe urbaine et de la silhouette villageoise

Organiser les transitions entre ville et « campagne ».

Graduer les densités depuis la périphérie vers le centre

Assurer la qualité des entrées de ville.

Ne pas déconstruire la silhouette d’un village par des volumes bâtis en rupture avec la trame urbaine (orientation, gabarit…).

Restructurer / requalifier les zones d’activités, commerciales et les zones d’habitat en discontinuité pour traiter les lisières urbaines.

Aménager des coupures d’urbanisation pour éviter les continuums urbains et la perte de lecture des limites.
S’appuyer sur des structures paysagères : ripisylves, alignements d’arbres, haies, boisement…

Assurer la préservation et la valorisation des milieux humides et rivulaires

Assurer l’entretien des ouvrages nécessaires aux eaux de surface : martelières, canaux, rogoles…

Préserver ou reconstituer les motifs paysagers associés : haies, bosquets, roselières…

Contenir l’urbanisation (habitat et activités) à proximité des milieux humides ; maintenir / composer une zone tampon entre milieux humides et urbanisation

Valoriser les paysages des rivières : entretien des ripisylves, ménager des ouvertures vers le paysage rivulaire, aménager des points de vues…

Engager / anticiper la reconversion des zones d’extraction : base de loisirs et reconstitution de milieux humides (mise en eau).

Valoriser l’agriculture pour son rôle dans l’entretien des paysages et le maintien de la qualité paysagère

Encourager une agriculture diversifiée qui participe à la multiplicité des paysages.

Préserver les trames paysagères associées aux pratiques agricoles : haies, canaux…

Soutenir l’agriculture de proximité pour la reconstitution des circuits courts.

Encourager la réhabilitation des bâtiments d’exploitation traditionnels et la préservation des petits éléments : puits, cabanons, murs en pierre…

Accompagner les équipements nécessaires à l’activité agricole : hangars, serres… dans leur forme, dimensions, matériaux…

Composer un paysage valorisant pour les zones d’activités économiques et rompre les logiques marchandes, commerciales et fonctionnelles

Assurer un traitement qualitatif des abords (parking, aires de stockage et de manutention) et des interfaces.

Travailler les marges de recul tout en conciliant le besoin d’être vu.

Gérer la signalétique (enseignes et pré-enseignes, panneaux publicitaires)

Avoir une exigence architecturale pour les bâtiments afin d’éviter le prototype et concilier les chartes des enseignes.

Encadrer le développement des énergies renouvelables et des infrastructures énergétiques

Tenir compte des impacts sur les paysages : déboisement pour l’implantation de fermes photovoltaïques. Encourager le solaire en toiture.

Tendre vers l’enfouissement des lignes HT et THT les plus prégnantes dans les perceptions : en crête, en plaine…

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